Nous sommes allés un jeudi après-midi de mai au CADA (Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile) de Vernon et nous avons commencé par une présentation du CADA par sa directrice Audrey Hebert.
Le CADA se situe dans l’enceinte du foyer Adoma, un foyer pour les travailleurs migrants qui comprend 207 places. Il y a ensuite 70 places pour le CADA et 70 pour l’ATSA, pour un accueil temporaire en relation avec l’OFII (Office Français de l’Immigration et de l’Intégration). Cela relève d’une convention entre Adoma et le ministère pour créer une réponse à la fluctuation et dégorger les régions parisiennes et lyonnaises. Le CADA est sous la tutelle de la préfecture de région. Il accueille des personnes en cours de procédure et qui n’ont pas les ressources suffisantes. Il y a un réel accompagnement mais il prend fin en même temps que la procédure.
Le CADA fonctionne par unités de vie de 7 chambres (isolée/famille …) dans lesquelles il y a partage de la cuisine, ou de la buanderie par exemple.
En 2013, il y avait 40% d’enfants au CADA. Les origines des arrivants sont diverses et varient en fonction des situations géopolitiques des pays et de leurs évolutions, les origines géographiques changent donc dans le temps. Actuellement, les principaux pays d’origine des résidents sont le Congo, la Russie, l’Afghanistan et le Tibet. Ces personnes demandent l’asile car elles ont du fuir leur pays, parce que leurs vies étaient menacées par une guerre, parce qu’elles ne pouvaient plus vivre sans crainte ou encore parce qu’elles risquaient d’être persécutées par exemple.
Les personnes en cours de procédure ont le droit au séjour, à l’aide sociale de l’État, à l’hébergement, à une allocation mensuelle d’environ 350€ et à la couverture médicale. Par contre, elles ne sont ni autorisées à travailler ni à suivre une formation professionnelle.
A la suite de la demande, il y a deux types de protection. D’abord il y a le statut de réfugié, établi par la Convention de Genève. Ce statut est obtenu dans le cas où la personne craint d’être persécutée à cause de sa race, sa religion, son opinion politique, son appartenance à un certain groupe social et qu’elle ne peut être protégée par son pays. A la suite de cela, la personne obtient une carte de séjour de 10 ans et un accès au droit commun. Ensuite, il y a protection subsidiaire, dans les cas où la personne ne rentre pas dans les critères de Genève mais est exposée à certaines menaces graves comme la peine de mort, la torture ou encore l’exposition dans le cadre d’un conflit armé. Dans ce cas, la personne accède aussi au droit commun.
La procédure est longue. D’abord les personnes se voient attribuer un domicile, on leur donne un premier rendez-vous à la préfecture, et elles ont accès aux premiers droits. Au premier rendez-vous, on prend l’emprunte digitale pour vérifier que la personne n’est pas enregistrée dans un autre pays européen. Ensuite, il faut remplir un formulaire sur l’identité, le pays d’origine et le motif de la venue. Ce formulaire doit être transmis à l’OFPRA sous 21 jours. Il y a à la suite de cela deux réponses possibles. Une réponse positive qui renvoie aux deux types de protection vus précédemment ou une réponse négative, auquel cas la personne peut faire un recours. Ce processus est très long et peut parfois prendre plusieurs années.
Dans le cas d’une réponse positive, le CADA peut aider la personne à s’intégrer, à trouver un logement, un travail par exemple.
Il faut savoir tout de même que seulement 15% des demandeurs d’asile voient leur requête validée à la cour nationale du droit d’asile. Il y a en moyenne 17 à 20% de chances de réussite dans la procédure de demande du statut de réfugié. Après un rejet définitif du CNDA, les personnes se voient obligées de quitter de territoire français dans un délai d’un mois. Elles se retrouvent sans titre de séjour et si elles sont interpellées, elle seront ramenées aux frontières. L’OFII les accompagne dans leur pays d’origine et leur apporte un soutien financier.
Il existe cependant un taux de réussite en fonction des pays d’origine. L’OFPRA a une liste des nationalités susceptibles de voir leur procédure accélérée, par exemple, les Syriens.
Ensuite, nous avons interrogé des demandeurs d’asile par petits groupes. J’ai interviewé Hermeline, qui venait du Congo-Angola (sa mère était congolaise et son père angolais). Elle a arrêté les études pour aider sa mère dans la vente de marchandises. Mais elle a rencontré des problèmes, elle a donc fui en France avec une amie en prenant l’avion à Brazzaville. Elle était en France seule avec son fils car sa famille était toujours au Congo-Angola. Quand nous l’avons rencontrée, elle était en France depuis 8 mois et depuis 5 mois au CADA. Elle n’a pas eu le choix, elle voulait aller en Angola mais c’était trop compliqué à cause des contrôles de voiture donc elle a fui vers la France car son amie était française. Elle nous a expliqué qu’elle se sentait mal en France, qu’elle voulait retourner en Angola. Elle a en effet rencontré des problèmes en France aussi pour trouver un endroit pour dormir avec son fils à Évreux. Ensuite, sa vie au CADA est désagréable. Elle fait le ménage ou regarde la télé, ou alors elle dort pour oublier le stress et faire passer le temps. Elle passe la plupart de son temps dans sa chambre, ne suit pas de cours de français, ne fait pas d’activités, ne sort pas de l’enceinte du CADA, et ne parle que très peu aux autres pour ne pas se créer de problèmes. Elle a dit „Il n’y a pas d’amis au CADA, que des connaissance.“ Elle trouve également l’attente très longue. Si elle obtient le visa elle reste en France mais sinon elle retourne en Angola et avec plaisir. Elle pense que l’aide est insuffisante et dit qu’elle aurait travaillé si elle pouvait.
Finalement, c’était très enrichissant d’interroger un demandeur d’asile. Cependant, j’ai été un peu déçue, un peu frustrée car elle était très secrète. Elle a du vivre beaucoup de douleurs parce que les raisons de son départ étaient vraiment quelque chose de très sensible pour elle qu’elle n’a même pas pu aborder. Bien évidemment je comprends mais c’est toujours un peu frustrant. De plus elle a été un peu contradictoire parce qu’elle a par exemple dit à un moment que la France c’était trop bien alors qu’elle ne souhaite pas réellement y rester. Cette expérience reste tout de même un très bon souvenir et quelque chose que je suis contente d’avoir fait parce que j’ai pu prendre conscience de la réalité totalement différente de certaines personnes si proches de moi qui vivent dans l’attente et la peur sans même que je le sache.
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