Article en français
Nous avons rencontré deux demandeurs d’asiles : Tamara Jalilova et Souleymane Bah.
Souleymane Bah est originaire de Guinée Conakry. Avant de nous raconter sa propre histoire, Souleymane nous a expliqué en détail l’histoire et la politique de son pays. La Guinée est composée de quatre ethnies principales, les Peuls, les Soussous, les Malinkés et les Forestiers. Durant toute la durée de l’interview, Souleymane a insisté sur le rejet de la minorité peule autant dans la société qu’au sein du gouvernement. Il y a différents dialectes mais la langue officielle est le Soussou. Par ailleurs, après son indépendance, la Guinée a d’abord connu un gouvernement démocratique sous Ahmed Sékou Touré de 1958 de 1984. Après sa mort, Lansana Conté renverse le gouvernement intérimaire et reste à la tête du pays pendant 24 ans. Il décède le 22 décembre 2008 des suites d’une longue maladie. Le lendemain, les dignitaires de l’armée annoncent la dissolution du gouvernement et la suspension de la Constitution. Moussa Dadis Camara est désigné comme chef du Conseil National de la Démocratie et du Développement (CNDD). Le 24 décembre, il devient le troisième président de la République de Guinée. Il annonce que ce gouvernement n’est que provisoire et que des élections devront être organisées en 2010. Seulement, il envisage au fur et à mesure de son mandat, de se représenter aux élections. Le 28 septembre 2009, des mouvements civils guidés par l’opposition organisent une manifestation pacifique afin de demander au président de respecter sa première parole et de ne pas se représenter. La foule de plusieurs dizaines de milliers de personnes se réunit dans le stade de Conakry, et les militaires leur tirent dessus, en les empêchant de sortir. On déplore la mort d’une centaine de personnes et de nombreux viols. Après une enquête internationale, ce massacre a été reconnu comme un acte prémédité et les principaux auteurs ont été ou sont encore jugés. Un aide de camp de Moussa Dadis Camara tente de l’assassiner, et Sékouba Konaté est appelé le 15 janvier 2010 à diriger un gouvernement d’union nationale dont les membres ne seront pas autorisés à se représenter. La date du premier tour des élections est fixée au 27 juin 2010. Alpha Condé est élu démocratiquement président de Guinée le 7 novembre 2010 pour un mandat de cinq ans. Souleymane nous a expliqué que la situation n’avait pourtant rien de démocratique, car il n’y a pas de liberté d’expression, pas de radio libre, la télévision et les médias sont régis par l’Etat.
Quant à lui, Souleymane a aujourd’hui 29 ans et il appartient à l’ethnie des Peuls. Il a perdu sa mère en 1998 et son frère ainé et sa sœur habitent actuellement aux Etats-Unis. Il a suivi ses études en français ce qui explique son choix pour la France en tant que pays d’accueil. Il a suivi des études de commerce en Guinée pour ensuite reprendre l’affaire familiale avec son père, un commerçant reconnu. Il était présent dans le stade le 28 septembre 2009. Il organisait aussi des tournois de foot clandestins, pour lutter contre la violence et inciter à la démocratie. C’est pourquoi il fut contraint d’émigrer en France : il était recherché par la junte. Les militaires sont arrivés chez lui dans le but de l’arrêter, mais par chance, il était allé voir un match de football chez un ami. Son frère l’a appelé pour le prévenir et l’inciter à fuir. Souleymane s’est alors rendu chez un ami habitant à 500km de chez lui. De-là, il a contacté un ami parti se former en France, afin de lui demander de démarrer les formalités d’accueil. Un ami travaillant dans la police le tenait informé des actions des militaires, et il a dû changer à plusieurs reprises sa date de départ pour ne pas se faire arrêter à l’aéroport. Il obtient un visa d’un mois pour la France après avoir prétendu s’y rendre pour des vacances. Il atterrit à Paris pendant l’été 2012 et reste bloqué 5 jours dans l’aéroport, à cause de problèmes administratifs. Il est finalement domicilié au secours catholique, nous ne savons pas dans quelle ville. Il a pris rendez-vous à Rouen afin de poursuivre ses démarches de demande de statut de réfugié. Il a pris contact avec ses cousins d’Allemagne qui ont pu lui apporter un soutien financier. Il était très motivé pour rester en France, car si il était renvoyé en Guinée, il risquait sa vie. Son père, à qui il était extrêmement attaché, a lui aussi risqué sa vie, pour sauver son fils. Après la fuite de Souleymane, son père a reçu plusieurs menaces et le 4 février 2013, il a été arrêté et envoyé dans un camp militaire pour y être interrogé et torturé. Souleymane qui gardait pourtant un contact régulier avec sa famille par téléphone, n’en était pas informé, car ils ont préféré ne pas l’inquiéter. Souleymane a appris quelques jours après le décès de son père, qui a succombé à ses blessures. Il est au CADA de Vernon depuis le 12 juillet 2012 et n’a aujourd’hui aucune activité, hormis un poste de bénévole au Secours Catholique vernonnais où il aide les guinéens qui tentent de s’y réfugier. Le jugement de sa demande de statut de réfugié politique aura lieu le 6 juin au CNDA. Souleymane aime bien la France, il s’y est fait quelques amis maintenant. Cependant, il se sent coupable de la mort de son père et ne supporte pas de ne pas travailler.
Tamara Jalilova est une Géorgienne de 32 ans, née le 1 avril 1982. Elle parle cinq langues : géorgien, russe, ukrainien, arménien, yezid kyurd et commence seulement à apprendre le français. Il était par moment difficile de se comprendre et nous n’avons certainement pas pu obtenir autant de détails qu’avec Souleymane. Tamara n’avait pas de travail en Géorgie, bien qu’elle ait suivi une formation technique de photographie et sur l’usage de Photoshop pendant 5 ans. Elle habitait à Tbilissi avec son mari Mark (avec qui elle était mariée depuis 4 ans), sa fille Karolina, sa sœur et ses parents. Ses ennuis avec le régime oppressif géorgien ont débuté à cause d’une dénonciation calomnieuse d’une de ses voisines, cette dernière était, aux dires de Tamara, jalouse de sa famille. La police a commencé par s’en prendre à son frère, qui s’est fait torturé et a succombé à ses blessures. Sa maison a ensuite été incendiée et ses papiers géorgiens confisqués. Son mari décide alors que la famille entière fuira en France : ils y arrivent en février 2012. Tamara était enceinte mais malheureusement elle a perdu son enfant suite à une fausse couche. Les raisons du choix de la France comme pays d’accueil par son mari nous restent inconnues. Sa sœur s’est mariée et habite aujourd’hui en Turquie et ses parents ont dû plus tard rentrer en Géorgie. Mark est tombé malade et sa prise en charge médicale a été très longue : en effet les médecins refusaient de le traiter. Il a donc dû se rendre à Evreux puis Paris, où il est décédé le 5 février 2013. Son corps a été rapatrié en Géorgie et Tamara a porté plainte contre les hôpitaux qui ont refusé de le soigner. Avant d’arriver au CADA, Tamara et sa fille ont habité au 115. Actuellement, Tamara essaie d’améliorer son français en prenant des cours au secours catholique le lundi, mercredi et vendredi. Elle n’a par ailleurs aucune activité professionnelle. Sa fille Karolina est à l’école et parle donc bien français, mais communique avec sa mère en géorgien. Tamara perçoit 490€ par mois. Elle a contacté l’OFPRA le 28 janvier 2013, mais après 11 mois d’attente l’organisme a refusé sa demande. Grâce à l’aide de son assistante sociale Corine, qui représente pour elle sa seule famille, Tamara bénéficie gratuitement d’un avocat pour faire appel. Quatre mois plus tard, l’OFPRA a une fois de plus répondu négativement. Elle attendait son recours et le juge devait envoyer sa réponse par courrier le 30 mai.
Article en allemand
Wir haben Souleymane Bah getroffen. Er ist Guineer (Peulstamm) und er ist 29 Jahre alt. Er hat 2012 sein Land wegen der politischen Krise verlassen. Er organisierte Fußballwettbewerbe, um gegen die Regierung zu kämpfen. Diese sportlichen Demonstrationen waren illegal, denn sie kritisieren das politische System. Die Aktivität wurde aufgedeckt : Souleymane musste dann sehr schnell allein und ohne seine Familie nach Frankreich fliehen, er hatte nämlich Französisch in der Schule gelernt. Seit er in Frankreich angekommen ist, hat Souleymane viele Sorgen : sein Vater wurde von der Polizei gefoltert und hat leider nicht überlebt, der Guineer hat auch große finanzielle Probleme.
Heute wartet Souleymane auf eine Antwort von der Regierung. Er hat im Asylantenheim fast keine Aktivität. Er spielt manchmal Fußball und hat sich freiwillig für den Secours Catholique engagiert. Souleymane hat uns viel über seinen Vater erzählt. Er war sehr bewegt, als er gesagt hat, dass sein Vater gestorben ist. Außerdem hat er uns klar die Geschichte seines Landes erklärt : er sah sehr engagiert aus !
Tamara Jalilova kommt aus Georgien und ist 32 Jahre alt. Sie ist im Asylantenheim mit ihrer Tochter Karolina seit Februar 2012 : sie musste Tbilissi verlassen, weil ihre Familie von ihrer Nachbarin angezeigt wurde. Die Nachbarin war bestimmt neidisch auf Tamaras Familiensituation. Die Polizei hat ihr ganzes Haus verbrannt und sie hatte keine Papiere mehr. Sie ist also mit ihrem Mann und ihrer Tochter nach Frankreich geflohen : sie weiß nicht warum ihr Mann Frankreich gewählt hat. Ihre erste Erfahrung mit Frankreich ist sehr negativ, denn ihr Mann wurde krank und kein Krankenhaus wollte ihn pflegen : so ist er schnell gestorben und heute ist Tamara allein. Sie findet, dass das Leben im Asylantenheim sehr langweilig ist, da sie nicht arbeiten darf und sie sich als eine Fremde fühlt. Indessen ist ihre Tochter Karolina sehr gut integriert, weil sie zur Schule geht sich sehr gut fühlt. Schließlich hat Tamara Freude in Vernon gefunden, obwohl sie am Anfang sehr allein war.
Die Besichtigung des Asylantenheims war für uns sehr fruchtbar. In der Tat haben wir Leute mit einer ganz anderen Kultur und Lebenserfahrung getroffen. Wir wurden mit einer anderen Realität konfrontiert. Früher wussten wir nicht, dass das Asylantenheim existierte : dieses Treffen mit Asylbewerbern hat unseren Blick auf Andere geändert. Es ist ganz selbstverständlich, dass der Besuch des CADAs zum Projekt « 3 for 1 Goal » gehört : es war ein Nachmittag, an dem wir viel mit Ausländern ausgetauscht haben und das Projekt an dem wir teilnehmen, stellt das Treffen verschiedener Kulturen dar.
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